La cinquième séance sur les retraites complémentaires des salariés du privé n’a pas permis de trouver un accord. Les négociateurs ont prévu de se revoir à l’automne pour tenter d’aboutir.
La pause estivale permettra-t-elle de rapprocher les points de vue ? À l’issue de la cinquième séance de négociation sur les retraites complémentaires des salariés du privé (Arrco et Agirc), le 22 juin au siège du Medef, les partenaires sociaux l’espèrent. Après avoir constaté leur profond désaccord, ils ont cessé les discussions et décidé de se revoir le 16 octobre pour se donner le temps de trouver une voie de passage.
La nouvelle version du texte patronal n’était pas de nature à permettre le début d’un accord. Par rapport à la rencontre du 29 mai dernier, les employeurs n’ont fait que très peu de concessions. Sur le sujet sensible des abattements « temporaires et dégressifs » notamment, le patronat a adouci sa proposition mais continue d’estimer qu’il est nécessaire de mettre en place un abattement élevé pour obliger les salariés à décaler leur âge de départ à la retraite. Tout juste a-t-il proposé de réduire à trois ans la mesure au lieu de cinq ans dans la précédente version du texte.
Des efforts, oui, mais raisonnables
Le niveau des abattements a également été réduit, mais pas de manière significative. Ils passent de 40 à 30 % pour les salariés partant à la retraite à 62 ans, de 30 à 20 % pour les salariés partant à 63 ans et de 18 à 10 % pour les salariés partant à 64 ans. Pour les salariés qui prendraient leur retraite à 60 ou 61 ans au titre du dispositif carrière longue, le texte patronal propose le même mécanisme d’abattement temporaire et dégressif de 30, 20 et 10 %.
« Nous sommes sur un désaccord de fond avec les employeurs, insiste le négociateur CFDT Jean-Louis Malys. Pour l’ensemble des organisations syndicales, il est inacceptable qu’un système de décote conduise des salariés à décaler l’âge de leur départ à la retraite. À la CFDT, nous sommes prêts à faire des efforts et notamment accepter un abattement temporaire pour améliorer la situation financière des régimes, mais cet effort doit rester raisonnable. Les employeurs sont dans une logique inverse. Peu importent les gains financiers de la mesure, ils souhaitent envoyer un message fort pour réaffirmer leur souhait de voir l’âge de départ à la retraite repoussé de quelques années. »
Malgré les cinq séances de négociation, les nombreuses rencontres bilatérales qui se sont déroulées ces derniers mois et l’accord de l’ensemble des organisations syndicales de salariés sur la question des abattements, le patronat est resté inflexible. Conclure un accord avant l’été est ainsi devenu impossible. Mais la négociation n’est pas terminée. La plupart des organisations syndicales souhaitent aboutir à un texte afin d’assurer la survie des régimes complémentaires à long terme. Rappelons que si aucune décision n’est prise, les réserves financières de l’Arrco seront épuisées autour de 2027 et celle de l’Agirc autour de 2018 (lire l’encadré ci-dessous). Des mesures drastiques devront alors être prises pour maintenir les régimes à l’équilibre, car ils n’ont légalement pas le droit d’être en déficit.
« Pour sortir de cette impasse, nous nous sommes donné un peu de temps, explique Jean-Louis Malys. Ces trois mois vont-nous permettre d’avancer sur le deuxième volet, essentiel, de l’accord : la création d’un régime unique qui remplacerait à l’horizon 2019 l’Arrco et l’Agirc. Une majorité d’organisations syndicales, dont la CFDT, y est favorable ainsi que le patronat. Vu la situation financière de l’Agirc, nous avons même l’obligation de parvenir à un accord pour que les cadres ne soient pas pénalisés. »
Une fois ce travail réalisé, tout le monde espère que chacune des parties mettra de l’eau dans son vin en ce qui concerne les mesures financières à court terme, notamment les fameux abattements temporaires et dégressifs mais aussi les cotisations patronales et salariales.
Ne pas sacrifier le long terme du fait du blocage actuel
Car depuis le début des discussions, les employeurs refusent catégoriquement d’acter une hausse des cotisations, alors que les organisations syndicales exigent que les entreprises participent également à l’effort de redressement des comptes des régimes. « Nous n’aboutirons pas en octobre, prévient Jean-Louis Malys, mais cette méthode permet de ne pas sacrifier le long terme en raison du blocage sur les mesures à prendre à court terme. Si nous parvenons à construire un nouveau régime qui assurera l’équilibre des régimes pour les nouvelles générations de salariés, il se-ra alors plus facile de s’entendre sur les mesures d’économie à prendre pour les deux ou trois ans à venir afin d’assurer la transition entre les deux systèmes. On peut raisonnablement espérer qu’un accord soit trouvé en fin d’année. En tout cas, la CFDT travaillera en ce sens. »
Régimes complémentaires dans l’impasse financière
Le déséquilibre démographique actuel impacte fortement les régimes complémentaires, qui fonctionnent selon le principe de la répartition. Les cotisations des actifs aujourd’hui ne peuvent plus servir intégralement les pensions des retraités. Les partenaires sociaux avaient anticipé ce déséquilibre temporaire en constituant des ré-serves financières pour passer cette période difficile, mais la crise économique de 2008 a accentué le déséquilibre et accéléré l’utilisation des réserves. Particulière-ment fragile, l’Agirc (complémentaire spécifique aux cadres) verra ses réserves épuisées en 2018 si aucune décision n’est prise. Or, pour revenir à l’équilibre, les services de l’Arrco et de l’Agirc estiment qu’il faudrait économiser autour de 8 milliards d’euros d’ici à 2020. Un véritable casse-tête en période de croissance faible ou nulle.
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